Le vaccin contre l’hépatite B & l’hésitation vaccinale

On estime qu’un tiers de la population mondiale a été infecté par le virus de l’hépatite B (VHB), ce qui représente un million de décès par an dans le monde due à une cirrhose ou à un cancer du foie (Dienstag, 2008 ; Yuen et al., 2018 ; Tripathi & Mousa, 2020). Le VHB envahit les cellules du foie et peut être transmis par les liquides biologiques, tels que le sang, le sperme, les sécrétions vaginales et de la mère au nouveau-né au cours de l’accouchement (Pyrsopoulos & Reddy, 2020). Une personne infectée par le VHB peut en infecter une ou deux autres, ce qui signifie que ce virus est plus contagieux que le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) par exemple (Graber-Stiehl, 2018).

Les vaccins contre l’hépatite B d’aujourd’hui ont été développés en 1986. Il s’agit de vaccins sous-unités qui ne contiennent qu’un seul ou plusieurs antigènes (cliquez ici pour en savoir plus sur les types de vaccins) (Gerlich, 2015 ; Tripathi & Mousa, 2020). Les vaccins contre l’hépatite B en formulations monovalentes (qui contiennent seulement l’antigène de l’hépatite B) sont disponibles pour les doses administrées à la naissance ou chez les adultes à risque. Le vaccin anti-hépatite B existent également en combinaison avec d’autres vaccins destinés aux nourrissons, notamment le vaccin contre la diphtérie, le tétanos et la coqueluche, le vaccin contre l’Haemophilus influenzae de type b et le vaccin inactivé contre la poliomyélite. Le vaccin anti-hépatite B peut également être associé au vaccin contre l’hépatite A (Dagan et al., 1997; Heininger et al., 2007; Pichichero et al., 2007). D’après une étude récente, la prévalence du virus de l’hépatite B chez les enfants aux États-Unis a été réduite de 68 % au cours des dix premières années de la vaccination universelle (Nelson et al., 2017).

Le vaccin contre l’hépatite B n’a lui non plus été épargné par les controverses. Dans les années 1990, une prétendue association entre le vaccin contre l’hépatite B et l’apparition de la sclérose en plaques a fait échouer les campagnes de vaccination en France (cliquez ici pour découvrir la frise chronologique de l’histoire des vaccins) (Le Houézec, 2014). L’idée d’associer la sclérose en plaques aux vaccins n’est pas nouvelle. En fait, il y a plus d’un demi-siècle, Miller soupçonnait déjà la possibilité que les vaccins puissent jouer un rôle par rapport à la sclérose en plaques ou comme facteur aggravant de sclérose en plaques existante. Le vaccin contre l’hépatite B a notamment fait l’objet d’importantes préoccupations, en particulier en France, où une campagne de vaccination massive contre l’hépatite B a eu lieu. A partir de 1993, cette campagne visait l’éradication de l’hépatite B à la suite des recommandations de l’OMS (Miller et al., 1967; Chivoret, 2010). À la différence d’autres pays, comme le Royaume-Uni et l’Italie, où la vaccination contre l’hépatite B ne ciblait que les enfants, une vaccination massive de la population adulte a également eu lieu en France. Il en est ressorti une « vague » d’immunisation sans précédent au niveau de la population adulte, 20 millions de Français se sont fait vacciner contre l’hépatite B entre 1994 et 1997. En 1996, les premiers cas de sclérose en plaques supposés être liés à la vaccination ont commencé à apparaître. Deux ans plus tard, en 1998, les médias français ont dévoilé une éventuelle survenue/association de la sclérose en plaques suite à la vaccination (Le Houézec, 2014). Sous la pression de l’opinion publique, le ministre français de la Santé a alors décidé de mettre fin à la vaccination systématique en milieu scolaire afin d’apaiser l’inquiétude du public, alors que l’OMS et d’autres comités scientifiques ont conseillé le contraire. Cette décision a évidemment augmenté les inquiétudes. Depuis, et pendant au moins dix ans, moins d’un tiers des enfants ont été vaccinés contre l’hépatite B. Même si aujourd’hui le consensus de la communauté scientifique constate qu’il n’existe pas de lien entre le vaccin et la sclérose en plaques (Zipp, 1999 ; Sadovnick & Scheifele, 2000 ; Touzé et al., 2002 ; DeStefano et al., 2003 ; Chivoret, 2010). Cet épisode, poussé par une médiatisation alarmiste, témoigne bien comment la confiance du public peut être détruite par les actions précipitées des autorités qui décident de renoncer à une campagne de vaccination en dépit des recommandations (Le Houézec, 2014 ; Séminaire Ketty Schwartz, 2014). 

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Bibliographie et webographie consultées en mai 2022 :

Chivoret I. (2010). Hepatitis B vaccination and the risk of demyelinating disease in France. Opinio Juris, 3: 1-25.

Dagan R., Igbaria K., Piglansky L., Melamed R., Willems P., Grossi A., & Kaufhold A. (1997). Safety and immunogenicity of a combined pentavalent diphtheria, tetanus, acellular pertussis, inactivated poliovirus and Haemophilus influenzae type b-tetanus conjugate vaccine in infants, compared with a whole cell pertussis pentavalent vaccine. The Pediatric Infectious Disease Journal, 16(12): 1113–1121.

DeStefano F., Verstraeten T., Jackson L. A., Okoro C. A., Benson P., Black S. B., Shinefield H. R., Mullooly J. P., Likosky W., Chen R. T., Vaccine Safety Datalink Research Group, National Immunization Program, Centers for Disease Control and Prevention. (2003). Vaccinations and risk of central nervous system demyelinating diseases in adults. Archives of Neurology, 60(4): 504-509.

Dienstag J. L. (2008). Hepatitis B virus infection. The New England Journal of Medicine, 359(14): 1486–1500.

Gerlich W. H. (2015). Prophylactic vaccination against hepatitis B: achievements, challenges and perspectives. Medical Microbiology and Immunology, 204(1): 39–55.

Graber-Stiehl I. (2018). Africa’s silent epidemic. Nature, 564: 24-26.

Heininger U., Sänger R., Jacquet J.-M., & Schuerman L. (2007). Booster immunization with a hexavalent diphtheria, tetanus, acellular pertussis, hepatitis B, inactivated poliovirus vaccine and Haemophilus influenzae type b conjugate combination vaccine in the second year of life: Safety, immunogenicity and persistence of antibody responses. Vaccine, 25(6): 1055–1063.

Le Houézec D. (2014). Evolution of multiple sclerosis in France since the beginning of hepatitis B vaccination. Immunologic Research, 60(2-3): 219–225.

Miller H., Cendrowski W., & Schapira K. (1967). Multiple sclerosis and vaccination. British Medical Journal, 2(5546): 210–213.

Nelson N. P., Easterbrook P. J., & McMahon B. J. (2016). Epidemiology of Hepatitis B Virus Infection and Impact of Vaccination on Disease. Clinics in Liver Disease, 20(4): 607-628.

Pichichero M. E., Bernstein H., Blatter M. M., Schuerman L., Cheuvart B., & Holmes S. J. (2007). Immunogenicity and safety of a combination diphtheria, tetanus toxoid, acellular pertussis, Hepatitis B, and inactivated Poliovirus vaccine coadministered with a 7-valent pneumococcal conjugate Vaccine and a Haemophilus Influenzae type b conjugate vaccine. The Journal of Pediatrics, 151(1): 43–49, 49.e1-2.

Pyrsopoulos N. T., & Reddy K. R. (2020). Hepatitis B. Medscape > Drugs & Diseases > Gastroenterology : https://emedicine.medscape.com/article/177632-overview

Sadovnick A. D., & Scheifele D. W. (2000). School-based hepatitis B vaccination programme and adolescent multiple sclerosis. The Lancet, 355(9203): 549–550.

Séminaire Ketty Schwartz 2014 : Vaccination. Accueil iPubli > Les dossiers de la Mission Associations Inserm > Les séminaires de formation Ketty Schartz. De Guimezanes A., Mathieu M., & Sabuncu, E. Rapport. Paris : Inserm, 2014, 105 p. https://www.ipubli.inserm.fr/handle/10608/10048

Touzé E., Fourrier A., Rue-Fenouche C., Rondé-Oustau V., Jeantaud I., Bégaud B., & Alpérovitch A. (2002). Hepatitis B vaccination and first central nervous system demyelinating event: a case-control study. Neuroepidemiology, 21(4): 180–186.

Tripathi N., & Mousa O. Y. (2020). Hepatitis B. StatPearls [Internet]. Treasure Island (FL): StatPearls Publishing.

Yuen M.-F., Chen D.-S., Dusheiko G. M., Janssen H. L. A., Lau D. T. Y., Locarnini S. A., Peters M. G., & Lai C.-L. (2018). Hepatitis B virus infection. Nature Reviews Disease Primers, 4: 18035.

Zipp F., Weil J. G., & Einhäupl K. M. (1999). No increase in demyelinating diseases after hepatitis B vaccination. Nature Medicine, 5(9): 964–965.