Le vaccin contre la rougeole & l’hésitation vaccinale

La rougeole est une infection pédiatrique virale caractérisée par une éruption cutanée et une forte fièvre, passant par différentes phases cliniques. Le virus de la rougeole se transmet par la toux et les éternuements, par des contacts physiques de proximité ou par contact direct avec des liquides infectés provenant du nez ou de la bouche. En général, une personne infectée peut en infecter 12 à 18 autres, ce qui rend la rougeole très contagieuse (Naim, 2015 ; Griffin, 2018). Avant le début de la vaccination massive, la rougeole était surtout une maladie qui touchait les jeunes enfants, avec plus d’un million de cas déclarés chaque année. 

Le vaccin contre la rougeole est généralement une formulation à plusieurs composants dits ROR, qui désignent la rougeole, les oreillons et la rubéole, c’est un vaccin vivant atténué (cliquez ici pour en savoir plus sur les types de vaccins) (Griffin, 2018). Il existe d’autres formulations du vaccin anti-rougeole qui associent des composants différents administrés selon leur propre calendrier de vaccination. Les formulations les plus courantes sont les vaccins RORV (rougeole, oreillons, rubéole et varicelle) et RR (rougeole et rubéole). Suite à des campagnes de vaccination massive menées pendant 5 ans (de 1999 à 2004), les cas de rougeole ont diminué de près de 50% (Moss & Griffin, 2006).

En revanche,  la couverture vaccinale depuis 2004 a diminué et de nombreux foyers de la maladie ont été enregistrés (Béraud et al., 2018). Au cœur de cet échec se retrouve l’une des controverses les plus notoires dans le domaine de la vaccination : l’affaire Wakefield (Wakefield et al., 1998, article rétracté). Celle-ci est également décrite dans la rubrique dédiée à l’histoire de la vaccination. À la fin des années 1990, le Dr Andrew Wakefield a affirmé que le vaccin contre la rougeole, les oreillons et la rubéole prédisposerait à la régression comportementale et aux troubles du développement, tel que l’autisme, chez les enfants. Certaines suppositions reposaient sur des constatations réalisées sur un effectif de patients atteints d’autisme trop faible, avec une conception d’étude très médiocre. L’étude a été largement diffusée et a été publiée dans une revue très prestigieuse intitulée « The Lancet ». Après la médiatisation suscitant une inquiétude généralisée, des études épidémiologiques, réfutant le lien supposé entre la vaccination contre la rougeole et l’autisme, ont été réalisées et publiées. En raison d’études scientifiques contredisant ce lien, 10 des 12 co-auteurs se sont rétractés de l’article publié dans « The Lancet » en admettant que leurs données étaient insuffisantes. En fin de compte, l’article entier a été retiré de la revue au bout de 12 ans en février 2010  et l’auteur fut jugé coupable de violation du code éthique et de fausse déclaration scientifique (Rao & Andrade et al., 2011). Cet incident a déclenché une nouvelle ère de controverses sur les vaccins où la « désinformation » scientifique sert de base pour contredire des faits scientifiques (Rao & Andrade et al., 2011).

À la suite de cette controverse, la couverture vaccinale française a progressivement diminué et le pays a finalement connu plusieurs vagues d’épidémies de rougeole, dont la plus notable est celle de 2008-2011 qui a entraîné la mort de dix personnes, incluant sept patients immunodéprimés (Finnegan, 2018). En 2018, la France a enregistré une nouvelle flambée dans six régions du pays. L’épidémie a principalement touché les enfants trop jeunes pour recevoir le vaccin ROR et, une fois de plus, les personnes immunodéprimées. Les patients immunodéprimés font partie d’une population qui ne peut pas se faire vacciner à cause de leur maladie ou de leur traitement et dont la protection dépend donc d’une « immunité collective » (Finnegan, 2018). 

Alors que les vaccins contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite étaient autrefois les seuls vaccins obligatoires en France, le nombre de vaccins obligatoires est passé à 11 en 2018. La vaccination contre la rougeole est donc devenue obligatoire à partir de 2018, ce qui a permis d’améliorer la couverture vaccinale. Malgré tout, cela a également conduit à une forte mobilisation anti-vaccins et un manque de confiance tenace par rapport aux autorités chez certaines sous-populations (Ward & Peretti-Watel, 2020). 


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Bibliographie et webographie consultées en mai 2022 :

Béraud G., Abrams S., Beutels P., Dervaux B. & Hens N. (2018). Resurgence risk for measles in France in 2018 and 2020. Euro Surveillance, 23(25): 1722796.

Finnegan G. (2018). France Measles Outbreak: Babies Hit Hardest. Vaccines Today : www.vaccinestoday.eu/stories/france-measles-outbreak-babies-hit-hardest/

Griffin D. E. (2018). Measles Vaccine. Viral Immunology, 31(2), 86–95.

Moss W. J., & Griffin D. E. (2006). Global measles elimination. Nature Reviews Microbiology, 4(12): 900–908.

Naim H. Y. (2015). Measles virus. Human Vaccines & Immunotherapeutics, 11(1): 21–26.

Rao T. S., & Andrade C. (2011). The MMR vaccine and autism: Sensation, refutation, retraction, and fraud. Indian Journal of Psychiatry, 53(2): 95-96.

Wakefield A. J., Murch S. H., Anthony A., Linnell J., Casson D. M., Malik M., Berelowitz M., Dhillon A. P., Thomson M. A., Harvey P., Valentine A., Davies S. E. & Walker-Smith J. A. (1998). Ileal-lymphoid-nodular hyperplasia, non-specific colitis, and pervasive developmental disorder in children. The Lancet, 351(9103): 637-641.

Ward J. K., & Peretti-Watel P. (2020). Comprendre la méfiance vis-à-vis des vaccins : des biais de perception aux controverses. Revue française de sociologie, 61(2): 243-273.